L'avenue Louis Bertrand est une des plus belles artères de Bruxelles |
Le
Schaerbeek urbanisé,
tel que nous le connaissons aujourd’hui est tout récent. Jusqu’au
XIXe siècle, Schaerbeek est un petit village situé à quelques
kilomètres de l’enceinte fortifiée de la ville de Bruxelles. On
se croirait au moyen-âge. Quelques fermes sont disséminées dans
les champs. Elles approvisionnent les marchés de la capitale en
céréales, légumes et fruits. Au cœur du village, autour de
l’ancienne église Saint-Servais, de petites maisons se serrent les
unes contre les autres en une dizaine de ruelles qui serpentent tel
un labyrinthe.
L'ancienne
église Saint Servais telle qu'on la découvrait en venant de la chaussée de Haecht |
Mais
la marche vers le progrès est inéluctable.
Dès 1818, on démolit les remparts de Bruxelles. En 1835, la
première ligne de chemin de fer est construite sur le continent.
Elle part de l’Allée Verte pour rejoindre Malines. Elle traverse
Schaerbeek et pas moins d’une quinzaine de passages à niveau
entravent la circulation. En 1860, l’abolition du droit d’octroi
va considérablement changer la physionomie des abords de Bruxelles.
L’urbanisation
se fait de manière complètement anarchique.
Des propriétaires de terrains peu scrupuleux s’improvisent
promoteurs et créent des rues uniquement en fonction de leurs
intérêts. En 1864, la commune reprend les choses en main et édicte
enfin des règles très strictes. Il est alors décidé d’assainir
le vieux Schaerbeek. L’idée est de construire une large avenue
résidentielle de 40 mètres de large, longue de 250. Elle partirait
du haut de la chaussée de Haecht pour rejoindre le futur Parc
Josaphat. Le projet est ambitieux. Pour la première fois, la
création d’un quartier amène une réflexion globale sur le
développement ultérieur de la commune.
A
coup d’achats de gré à gré et d’expropriations,
la commune se rend propriétaire d’un terrain suffisamment vaste
afin d’entamer les travaux. Tout va commencer par la destruction de
l’ancienne église Saint Servais. Les artistes et la presse se
révoltent mais rien n’y fait. Le vieux village est rasé. Ne reste
que l’ancienne cure du XVIIIe encore visible aujourd’hui. Le promeneur la reconnaîtra
facilement. C’est la seule bâtisse en retrait, elle se cache
derrière des grilles cadenassée. Lors de l’inauguration de
l’avenue Louis Bertrand, l’immense Vase des Bacchanales, commandé
et offert par l’industriel Waroquée et créé par le sculpteur
Godefroid de Vreese, sera installé à l’emplacement précis du
cœur de l’ancienne église. Vu le sujet, on peut aisément deviner
de quel bord appartenait les autorités locales de l’époque. Une
fresque en céramique, posée sur la façade de l’immeuble conçu
par Gustave Strauwen rappelle
au promeneur ce qu’était l’ancien Schaerbeek.
Le vase des Bachanales avec tout au fond de l'avenue, le Parc Josaphat |
Pas
très catholiques,
ces Bachannales situées à l'emplacement exact
de l'ancienne église Saint Servais ! |
Pour
que le développement urbanistique de Schaerbeek soit de qualité,
l’administration communale met en place des incitants financiers
afin que les bâtiments construits soient de qualité. Elle impose un
coût de fabrication minimum de 50 francs le mètre de façade. Ce
qui est énorme pour l’époque. La demande de permis de construire
ne sera acceptée qu’après étude approfondie du devis présenté
par le maître d’œuvre. Un concours de façades annuel est
également mis en place. Un crédit annuel est réparti sous forme de
primes qui récompensent les lauréats. Inauguré en 1905, il
perdurera jusqu’en 1931 avec une interruption entre 1915 et 192. Le
jury est composé au minimum d’un architecte et d’un notable
choisis par l’Institut Supérieur de l’Art Public, d’un
architecte de la Société Centrale des Architectes de Belgique et
d’une personnalité de la Maison Communale. Le jury prend en
considération l’artère, l’endroit où la façade est construite
et regarde si l’œuvre contribue à l’embellissement de la rue.
Il tient compte également de l’importance de la façade, de ses
dimensions et du nombre d’étages. Quand les propriétaires
reçoivent leurs prix en espèces, les architectes, eux, sont
récompensés par des médailles (or, vermeil, argent, bronze). Entre
1906 et 1911, douze maisons de l’avenue Louis Bertrand seront ainsi
primées. Il faut noter qu’aucun des deux immeubles de Gustave
Strauwen, situés de part et d’autre de la rue Josaphat, ne sauront
primés ce qui exaspérera les tenants de l’Art Nouveau. Pourtant,
ces deux immeubles sont de toute beauté. Un soin tout particulier
est apporté au choix des matériaux, au traitement du décor. Les
ferronneries ne sont qu’entrelacs et circonvolutions, les boiseries
sont dessinées spécialement pour le bâtiment.
La
façade du 53-57 avenue Louis Bertrand,
une des plus belles réussites de Gustave Strauwen |
La
marquise du 65, l'autre immeuble de l'avenue Louis Bertrand
signé Gustave Strauwen |
La
plupart des maisons et immeubles de l’avenue Louis Bertrand sont de
style éclectique.
Celui-ci répond aux normes de bon goût de la bourgeoisie d’alors.
Il se caractérise par ses références au passé et se décline en
néogothique, néoroman ou néo renaissance flamande. Chaque façade
est différente, elle reflète l’individualité de celui qui l’a
fait construire. Malgré tout, une véritable harmonie se dégage de
cette diversité et la qualité des finitions est telle que cette
avenue reste sans conteste l’une des plus belles de Bruxelles.
Construite en 1970 à l’emplacement de l’ancien Palais des
Sports, se dresse l’imposante tour Brusilia. Avec ses 35 étages et
ses 100 mètres de hauteur, elle est le plus haut immeuble
résidentiel de Belgique.
1905-1970 Le raccourci est saisissant |
Au
niveau des bonnes adresses, j’en
ai quelques unes à vous recommander. Il y a bien sûr ces trois
restaurants italiens incontournables que sont le Stelle,
l’Osteria delle Stelle et la Buca
di Bacco.
Le Namasthé, épicerie-salon
de thé qui ne vend que des produits bio de toute première qualité,
mérite sans conteste une petite visite. Quant à la Librairie
100Papiers, son espace convivial fera certainement le bonheur de
tous les schaerbeekois amoureux de bonnes lectures et de beaux
livres. Et je n'oublierai certainement pas le Café Poussette,
premier établissement à accueillir les papas, les mamans ET
leur poussette. Tandis que les adultes se retrouvent entre eux pour
boire un verre ou manger un bout, les petits ont leur espace où ils
peuvent s'amuser en toute sécurité....
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